Il est deux heures du matin, et comme vous vous en doutez il fait nuit ! Je monte dans mon auto, un Scenic, j’ai environ 110 km pour rentrer. Je raccompagne mes deux jeunes collègues qui, elles, auront encore 55 kilomètres supplémentaires pour rejoindre leurs habitations. Heureusement, en tant que capitaine de soirée, je n’ai consommé qu’une bière en apéritif, ensuite quelques cocktails à base de Badoit, Evian ou encore plus fort, San Pellegrino, le retour de congrès s’annonce sans histoire.
Une route tranquille
Nous décollons et une conversation animée s’engage. Pour varier les plaisirs, je décide d’emprunter une route un plus plus courte que l’autoroute, histoire de changer un peu des habitudes. Petit souci, je me rends compte que ma jauge de carburant n’est pas au beau fixe. Rien de grave, avec le raccourci, j’assure notre retour sans risquer une panne déshonorante. Je n’en parle pas à mes passagères afin que l’ambiance reste détendue dans l’esprit de la soirée conviviale que nous venons de passer.
Nous sommes attendus
Je ne reconnais pas cette route. Les panneaux ont l’air de valider cet itinéraire, mais je n’ai aucun souvenir d’être passé par ici un jour, curieux ! Je persiste donc et en arrivant à un carrefour, un homme surgit soudainement sur ma gauche et se plante devant le capot. Il me braque une puissante torche directement dans les yeux, j’en suis aveuglé et un cri de surprise, en stéréo, jailli des poitrines de mes passagères. Qui nous attaque ainsi ? Un véhicule bleu avec un gyrophare assorti garé à proximité nous renseigne sur la nature des assaillants : « Bonsoir monsieur, pourriez-vous me présenter votre permis de conduire et les papiers afférents à la mise en circulation du véhicule s’il vous plaît ? »
Des routes mal fréquentées
L’intermède ne dure pas longtemps. Je suis en règle et l’éthylotest atteste de ma sobriété. Nous apprenons, quand je fais part de ma surprise de ce contrôle au policier, qu’un gang des Scénics écume actuellement la région ! Je trouve cela assez curieux, l’image de ce véhicule est assez pépère et je ne vois pas un groupe de délinquants l’adopter ! Justement, c’est précisément la raison de leur choix, ils passent ainsi plus inaperçus et se font beaucoup moins contrôler qu’avec des voitures sportives. La jauge indique qu’il nous reste 120 km avant la panne.
Le retour du congrès
Nous repartons vers une route plus tranquille, vers l’autoroute. Se faire contrôler par les forces de l’ordre au beau milieu de la nuit, on connait des activité plus réjouissantes. Et maintenant, risquer de tomber sur une bande de malfaiteurs en Scénic, nous ne recherchons pas l’aventure. Un véritable tapis fait pour avancer se déroule devant nous. La vitesse augmente régulièrement et l’excitation de cet intermède fait place à la fatigue. Une torpeur s’installe parmi mes passagères et un ronflement m’indique que le sommeil vient de remporter une victoire. J’assiste donc à un joli duo. D’habitude je roule sans musique mais là, cette symphonie a cappella, envahit l’habitacle. La jauge chute brutalement vers une autonomie restante de 80 km.
Premières angoisses
Rouler plus vite augmente la consommation, je préfère donc assurer notre retour, je lève le pied. Un bip retenti soudain, il m’indique que la jauge restera muette à présent et que je dois me diriger vers la station service la plus proche. Généralement, je fais encore 50 km avant d’obtempérer, j’ai déjà testé, çà passe sans problème. Là, il reste environ 60 km avant l’arrivée, je me dis que c’est bon. De toute façon, je viens de dépasser le dernier poste d’essence qui longe notre chemin du retour. Je ne suis pas inquiet pour rentrer, enfin pas trop.
J’approche du but
J’aperçois au loin les lumières indiquant la position des éoliennes à côté de notre sortie. Je doute de plus en plus de pouvoir revenir jusqu’à la maison avec le peu de carburant de mon réservoir, je serre de plus en plus les fesses même si je sais pertinemment que l’utilité de cette démarche est nulle. Voici enfin la bretelle tant attendue ! Mais non, mes sens m’abandonnent, elle se trouve encore à 18 km, cette fois-ci je ne vais pas échapper à la panne sèche. Mes passagères ne se doutent pas du tout du drame qui se joue, elles dorment ! Cette fois-ci c’est la bonne, je lance mon auto sur la voie de dégagement, il ne me reste que 6 km avant l’arrivée.
Aïe aïe aïe caramba
Un trou dans l’accélération lance un signal dans ma tête. Oh non ! Pas maintenant, allez encore un petit effort, 6 km seulement ! Je dois me rendre à l’évidence, mon véhicule est plus chargé qu’à l’ordinaire, j’ai certainement consommé plus, quelle galère ! Je me range sur le côté si bien que je vais devoir expliquer la situation aux dormeuses. Elles ont le sommeil lourd, pour le moment aucune n’a remarqué notre arrêt. Je tente d’appeler mon épouse pour qu’elle vienne à notre rescousse. Manque de pot, je tombe directement sur sa messagerie. Je me rappelle qu’elle bascule toujours son téléphone en mode avion pour la nuit.
Un sauveur inattendu
La chance revient, un véhicule se gare juste derrière moi et il me fait un bref appel de phares. Je sors de l’habitacle pour me diriger vers lui, super un Scénic ! Entre propriétaires de véhicules similaires, il y a toujours une solidarité qui s’installe. Il me rejoint et paraît surpris de me voir ici : « Qu’est-ce-que tu fais là ? Je pensais qu’on se retrouverait à 4h30 précises au prochain échangeur ! » Je ne comprends rien à son discours, je l’informe de ma panne sèche. Pourquoi ? Je ne sais pas, mais çà à l’air de le rassurer, il va fouiller dans son coffre et en sort un jerrican. Il ouvre ma trappe et vide doucement le contenu dedans.
Je suis la voiture douze
Je le trouve très sympathique, il arrive vraiment à point nommé avec son bidon et il confirme ce que je savais déjà : la solidarité des scénicophiles ! Soudain il remarque mes deux passagères endormies. « Qui c’est celles-là ! Le boss est clair, si tu ne veux pas d’ennuis, tu dois t’en débarrasser ! T’es bien le nouveau ? » Ce doit être l’heure tardive, j’ai du mal à assimiler ses paroles. Il remet son bidon dans son coffre et revient vers moi avec un air beaucoup moins avenant. « Mais t’es qui toi ? t’es bien la voiture douze ? » Cela semble tellement lui faire plaisir que je sois la voiture douze, que je lui confirme volontiers. Je viens de faire connaissance avec un membre du gang des Scénics !
Les hommes en bleu
Je reste indécis quand à l’attitude à adopter parce que je le sens de plus en plus suspicieux à mon égard. Il me pose des questions si bizarres que je sèche pour des réponses cohérentes. Il va démasquer mon imposture tôt ou tard, ce n’est qu’une question de minutes. un gyrophare bleu crève la nuit de ses éclairs. Mon sauveur réagit promptement et se jette au volant de son auto en m’exhortant de le suivre sans délai et il disparaît. Des hommes en bleu remplacent l’inconnu et recommencent le même protocole subit une heure plus tôt. Un retour de congrès n’est pas de tout repos.
Facile ce retour du congrès
J’arrive enfin au bout de ma rue. Comme par magie, mes deux collègues se réveillent en même temps. Il leur reste encore une grosse demi-heure de route. Heureusement pour elles, elles ne circulent pas avec un Scénic ! Je leur déclare que tout s’est bien passé et je leur demande si elles pensent pouvoir assumer leur retour. Pas de problème, grâce à leur roupillon, elles pètent le feu ! Je préfère ne pas les perturber avec les détails de la route, je leur ferait simplement lire cette histoire pour qu’elles sachent à quoi elles ont échappé pendant le retour du congrès.
Que de rebondissements dans cette histoire ! J’ai moi aussi entendu parler de ce gang de scenic, ils ont cassé mes enjoliveurs ! Les garnements !
Dans quel monde on vit !
Je trouve que cette histoire réunie l’improbable et la coïncidence en même temps, en plus d’être assez drôle.
La vie est faite de pleins d’imprévus et de rencontres improbables. Merci Maureen pour ton commentaire.