Dauphin contre jet ski

dauphin contre jet ski

Le plein de sensations

La motomarine flirte maintenant avec les 80 km/h. A cette vitesse, une erreur de pilotage peut devenir fatale. L’eau n’est plus cet élément liquide dans lequel on nage tranquillement. Elle devient aussi dure qu’une route goudronnée qui ne fera aucun cadeau en cas de chute. En ce moment ces considérations sont loin de moi. Je me grise simplement de la vitesse de mon engin. Le danger qu’il représente n’est qu’une façon d’augmenter mon adrénaline jusqu’à la surdose. La moindre vaguelette devient un tremplin qui me donne l’impression de voler. Au cours d’un saut, je remarque quelque chose de bizarre sur ma droite. Au fur et à mesure que je me rapproche, je cherche à identifier cet objet au ras de l’eau. Je réduis ma vitesse et bifurque pour en avoir le cœur net.

Qu’est-ce qui flotte là-bas ?

Je pense, pour commencer, avoir affaire à une bouée. De nombreux pêcheurs, professionnels et amateurs, parsèment la zone proche de la côte de casiers. Ils attrapent des crabes suicidaires ou des bulots inconscients qui entrent dans leurs nasses avec l’espoir d’un gueuleton. Malheureusement pour eux, autant l’entrée leur est facilitée que la sortie leur est impossible. Pour ne pas perdre leur butin, les amateurs de crustacés marquent leurs emplacements avec des flotteurs. Ceux-ci sont assez hétéroclites, souvent un simple bidon avec un bout de bois agrémenté d’un drapeau. Ce que je vois me semble beaucoup plus gros, c’est ce qui a attiré mon attention.

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Cordages et dauphin

J’aborde à vitesse réduite ce qui ressemble, vu de près, à un cadavre de dauphin. Du moins c’est ce que je pense dans un premier temps. L’animal est piégé dans un filet. Il a du se noyer me dis-je. Mais, alors que je m’apprête à relancer mon moteur, il bouge. Je le vois, il pivote sur lui-même et prend une inspiration. Mon arrivée a dû lui donner un espoir de s’en sortir. Il se contorsionne ce qui a pour effet de l’emberlificoter un peu plus. Il semble complètement épuisé. Je dois agir si je veux le sauver.

Agir ou ne pas agir ? une bonne question

 Malgré sa position inconfortable et son manque de dynamisme, je ne suis pas rassuré. La bête est énorme, elle fait plus de 2,5 m de long. Je ne sais pas quelle conduite tenir. Après une courte réflexion, je me dis que c’est tant pis pour lui. Un animal sauvage doit se débrouiller seul dans une nature qui est, par définition, hostile. Je vais donc partir et oublier ce que je viens de voir. Une petite voix intérieure réagit et me traite de lâche. Ce n’est pas la nature qui le condamne, mais un filet abandonné ou perdu par un homme qui ne s’est pas soucié des retombées de son indifférence.

Un marin doit être bien équipé

Il n’est plus temps de tergiverser. J’attrape le couteau attaché à ma ceinture. Le sauveteur de la SNSM (Société Nationale des Sauveteurs en Mer) qui me l’a vendu à la boutique de la station, m’a vanté ses mérites avec une lame en céramique plus affûtée qu’un rasoir. Le jour où vous aurez chopé un filet dans l’hélice de votre bateau, vous serez content de votre investissement. J’avais hésité, il n’y a pas d’hélice sur mon pur-sang, mais je leur dois une fière chandelle, l’affaire fut donc conclue. Il ne pensait pas si bien dire, ce déchet en forme de piège pour le cétacé, me sert de test grandeur nature.

Des spectateurs attentifs

Je me penche et attrape le premier bout qui passe à ma portée. Le couteau rempli son office. L’animal se laisse faire. Tout occupé à ma tâche, je ne remarque pas immédiatement que nous ne sommes plus seuls. Encore une maille supplémentaire qui cède, puis une autre. Soudain, je me retrouve au milieu d’une quinzaine d’individus. Des compagnons de mon naufragé je suppose. Un mouvement de recul m’interrompt dans ma tâche. Ils ne s’agitent pas et se contentent de tourner autour de nous, j’ai vraiment la trouille. Je dois mener mon action à son terme.

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Qui rêve de nager avec un dauphin ?

Une partie du filet est en partie incrustée dans la peau du dauphin. Le geste doit rester précis. Manque de bol, un clapot me déséquilibre et je tombe à l’eau en l’entaillant un peu. Quelle galère, que va-t-il m’arriver ? Curieusement, je reste confiant pour la suite et je profite de ma nouvelle position pour trancher la dernière entrave. Il est libre. J’entreprends de remonter sur ma machine et surprise, quelqu’un me pousse au derrière. J’atterri directement à mon poste de pilotage. Dix secondes plus tard, je me retrouve seul. Plus aucun de ces mammifères n’est visible. Je crois en voir un qui reprend son souffle plus loin, c’est terminé.

Mon devoir accompli

Un peu hébété, je me demande si je n’ai pas rêvé. L’opération a duré en tout à peine cinq minutes. Des morceaux de cordage en nylon, m’indiquent la réalité de ce sauvetage. Je repars mais à une vitesse plus réduite, assez d’émotions pour aujourd’hui. La scène tourne en boucle dans ma tête. Je pense à tout ce qui aurait pu mal tourné. Au contraire, une petite fierté du devoir accompli, m’encourage et me conforte dans la décision prise. Ce n’est sans doute pas une coïncidence, mais je croise une troupe de dauphins juste avant l’atterrissage.

Que penses-tu de cet événement ? Le dauphin doit-il se débrouiller seul ? J’attends tes commentaires et n’hésite pas à partager si tu as aimé.

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