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Une nuit qui commence.
La nuit n’est pas complète. Nous sommes trois jours avant la pleine lune, sa clarté avec ce ciel dégagé permet une vision, certes restreinte, mais pas nulle. Heureusement parce qu’il ne fait pas chaud. L’hélicoptère a stoppé ses recherches vers deux heures. Nous ne nous berçons pas d’illusions, il va falloir tenir au moins jusqu’à l’aube.
Un parcours sportif
Cette sortie à la voile avec notre catamaran de sport avait bien commencé. Un vent bien établi Nord-Ouest force 5, nous fournit une bonne motricité pour faire face à la houle. Des creux de deux mètres assurent le fun. Nous ne sautons pas encore les vagues, mais nous sommes plus secoués qu’à la foire du trône. Au mois de mai, l’eau est encore un peu froide, environ treize degrés. Une bonne combinaison néoprène résout ce petit souci.
Notre parcours est tout tracé, nous suivons la côte jusqu’à Carteret. Notre idée est de rejoindre l’arrivée de la course en avirons qui part de Jersey. Nous naviguons au près. Les trapèzes pour faire contrepoids sont utiles, ce n’est pas un temps pour les novices. En vue de l’objectif, nous réalisons qu’il n’y a pas grand monde sur l’eau. Les conditions météo sont certainement un peu trop extrêmes pour des rameurs. Il est temps de rentrer.
On accélère puis …
Le bord devient encore plus sportif. Nous sommes au portant dans le sens des vagues. Notre vitesse est telle que nous les dépassons pour entamer des surfs à répétitions. Nous allons peut-être battre notre record pour le retour. Nous sommes deux à bord et nos échanges verbaux sont peu nombreux si ce n’est des exclamations de contentement.
Ce fut très bref, le flotteur sous le vent, plus pressé que l’autre sans doute, décide de jouer les sous-marins. L’autre voyant son compagnon disparaître de sa vue, prend de la hauteur pour mieux apprécier la situation. Le coup de frein qui s’en suit est brutal. Nous nous retrouvons donc à patauger notre bateau retourné. Pas de panique, nous gérons. Un dessalement fait partie des joies de la navigation sur ce genre d’embarcation. J’en profite pour t’inviter, ami lecteur, à partager ce genre d’expérience avec moi.
Il y a des jours sans. Tous nos efforts pour tenter de redresser la situation restent vains. Plus une coque visible sur la mer pour nous aider. C’est ainsi que nous nous mettons à dériver. A trois cents mètres à peine du bord, il est tentant de le rejoindre à la nage. Grave erreur à ne pas commettre. Nous savons que le bateau ne peut pas couler et il est à peine dix-sept heures. Quelqu’un va forcément nous remarquer…
Le temps passe
La houle est de moins en moins forte. Le cadran lumineux de la montre de mon compagnon indique maintenant trois heures trente-cinq. Le temps ne passe pas vite. Nous sommes debout sur le trampoline immergé avec de l’eau à mi-cuisse. Loin de nous ramener vers la côte comme nous l’avions espéré, le courant nous entraîne dans un ballet que nous suivons grâce aux lumières des bourgs côtiers.
La lune a maintenant quitté le ciel. La luminosité n’a cependant pas baissé. Les premières lueurs de l’aube s’insinuent jusqu’à nous. La nuit fuit. Je suis sûr d’avoir entendu un bruit de moteur. Mon co-naufragé me confirme mon impression. Nous scrutons les flots pour découvrir l’origine de ce joli son à nos oreilles. Ce n’est qu’un point indistinct. Nos gestes en sa direction son frénétiques. Il ne semble pas nous voir, son cap indique clairement qu’il remonte au Nord, il s’éloigne.
Notre aventure prend fin
Un virage à quatre-vingt-dix degrés et il nous présente sa poupe. En clair, il vient de nous repérer et file directement dans notre direction. Le soulagement que nous ressentons à ce moment est indescriptible. Aujourd’hui encore quand je pense au moment où ces marins de la S.N.S.M. (Société Nationale de Secours en Mer) nous ont hissés à leur bord, l’émotion reste intacte. Eux-mêmes furent ravis de récupérer des hommes en bon état, ce qui n’est pas toujours le cas. Le soleil en profite pour nous caresser de ses premiers rayons du matin.
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