Restons concentrés
Je regarde discrètement ma montre, encore douze minutes avant la sonnerie. Je dois faire très attention, madame LEBOUVIER, quoiqu’une excellente professeure de français, a des principes. Elle ne supporte pas que quelqu’un regarde l’heure qu’il est. La plupart du temps ce n’est pas nécessaire, ses cours sont captivants et je ne vois pas le temps passer. Aujourd’hui c’est autre chose, nous sommes vendredi. Je suis en classe de 5ème au collège de TORIGNI sur VIRE, c’est le mois de mars, les beaux jours reviennent.
C’est surtout le jour de la galette. Ma grand-mère, depuis toujours, perpétue une tradition familiale. Tous les vendredis, elle fait des dizaines de galettes de Sarazin. Il se trouve qu’elle habite à moins de cent mètres de l’école. C’est ainsi que je lui rends visite très régulièrement, surtout ce jour-là. Je sais en plus qu’à midi, elle est toujours en train de les tourner. Si je me dépêche j’en aurai des chaudes.
Une tradition familiale
Enfin le gong tant attendu retentit. La discipline imposée par l’enseignante ne nous permet pas de ranger aussitôt nos affaires, il faut attendre son top départ. Heureusement, elle ne nous fait pas poireauter. C’est le début de la course. Dès le couloir, je salive déjà, je crois sentir les effluves d’une bonne galette bien chaude. Comme par hasard, un de mes ami qui habite un peu plus loin, me rejoint pour m’accompagner un bout de chemin. Je ne suis pas dupe, il est parfaitement informé des coutumes familiales. Je dois avouer que je suis fier de le faire profiter de l’aubaine. C’est ainsi que nous arrivons chez la mère de ma mère qui, une fois de plus, ne déroge pas à la coutume.
C’est du pur plaisir
Nous sommes accueillis par le bruit caractéristique de la pâte bien lisse qui réagit à la fonte chauffée de la tuile. C’est un enchantement, le tas est déjà conséquent, mais le plaisir, c’est de prendre la dernière arrivée. Mon copain ne se fait pas prier bien longtemps, il est vrai que l’horaire fait de nous des affamés. Il y a deux possibilités de garnitures, avec un peu de sucre, c’était ce que je faisais il y a quelques années, maintenant je deviens un homme, je dois donc évoluer. Le véritable plaisir c’est avec du beurre dedans, conformément à la chanson. Le voir fondre doucement, sentir ses saveurs subtiles, on ne pense absolument pas au cholestérol.
Merci grand-mère, je reviendrai
Mon pote repart, je reste seul mais pas pour longtemps. Un de mes oncles qui connaît lui aussi le filon déboule à son tour. Il se jette littéralement sur le tas, il n’attend même pas la chaude ! Et la mécanique continue, imperturbable, une louche après l’autre et le tas recommence à grimper. Il est temps de commencer les paquets. Ma grand-mère étant seule maintenant, ce n’est pas elle qui mange sa production, mais elle est généreusement distribuée à ses enfants présents sur la commune. Justement un autre de mes oncles arrive à son tour, les embrassades sont rapides et lui aussi attaque la pile. Il est plus modéré sur la quantité, cependant, la plaquette de beurre ne résiste pas à ses assauts.
Je prends mon quota dans un papier aluminium, ma maman ne devrait pas tarder à venir me chercher. Ce soir nous mangerons des galettes complètes, jambon, œuf, gruyère râpé et une bonne dose de crème pour lier le tout.
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