Je dois savoir rendre service
Debout 6 heures, il fait à peine jour. Quelle idée j’ai eu d’accepter de m’occuper de ce poney. Je suis en pension pour mes études chez ma sœur de douze ans mon aînée. Son mari, mon beau-frère élève des welch et des new-forest, en amateur. Ces animaux sont plutôt sympathiques et de bon caractère. Ils sont assez grands, ce qui permet de les monter sans avoir l’air ridicule. C’est une préoccupation quand on a dix-neuf ans. Ils sont partis avec tout un attirail sur une grande compétition. Mon neveu, leur premier fils, donne dans le concours hippique. Il reste tellement longtemps en selle qu’il en perce ses caleçons.
Pourquoi ai-je accepté de m’occuper de ce poney
Je suis donc désigné pour m’occuper de « Pompon ». Autour de la maison il y a quelques prés, tous les autres équidés qui ne sont pas partis faire la compétition se débrouillent. Sauf « Pompon qui s’est mis à tousser juste avant le départ. C’est un poney déjà âgé qui n’est quasiment plus monté. Il fait un peu partie de la famille si bien que l’inquiétude les a pris et j’ai dû m’engager à m’en occuper pendant leur absence. Quelques recommandations mais je n’aurai rien à faire, ils rentrent dès le lendemain soir. D’habitude j’arrive toujours à esquiver toutes les corvées liées à l’élevage. Ce n’est pas mon truc et eux y prennent grand plaisir.
Ce n’était pas prévu au programme
Et c’est ainsi que je me retrouve, avant les cours du matin, à donner la becquée à un canasson. Je m’approche du box, première bizarrerie, il ne passe pas la tête pour m’accueillir. Je me dis qu’il ne m’a pas entendu ce qui est surprenant. Alors, je l’appelle, aucune réaction. J’accélère pour le découvrir étalé sur la paille. Je me précipite sur lui, il relève la tête péniblement. Nous sommes en 1983 et il n’y a pas encore de téléphone portable pour appeler du secours. Que faire ? Je décide d’aller voir Francis, un voisin agriculteur qui a bien cent vaches, lui saura faire face à cette situation.
Il me faut de l’aide pour m’en sortir
Coup de chance, je tombe directement sur lui en arrivant dans la cour de sa ferme. Je l’informe de mon souci. Il consent à venir immédiatement pour constater l’état de pompon. Pour lui qui a vu des situations biens pires, il n’est pas vraiment ému. Il voit que je suis un peu paniqué par la responsabilité qui me tombe dessus. Il me donne les coordonnées du vétérinaire local afin que je puisse l’appeler. Lui doit repartir, le lait n’attend pas. Je le remercie vivement et fonce vers le téléphone. Douze sonneries et toujours pas de réponse. Il ouvre dans seulement dix minutes. Je regarde l’heure, mon contrôle de math commence dans vingt minutes, je dois partir.
Je dois également penser à moi
La situation est cornélienne, je ne vais quand même pas rater le lycée en plus un jour d’un examen. Je prends donc le volant et lance mon moteur. J’appellerai le véto plus tard. Avant de sortir sur la route, ma conscience me remonte les bretelles. Je range l’auto et retourne voir le malade. A mon arrivée, il relève la tête et me regarde avec des yeux tristes. Je lui dis qu’il n’est pas sympa avec moi, il aurait pu attendre le lendemain, je m’approche et tente de la faire boire un peu. Je lui propose même des carottes, je sais qu’il les aime. Peine perdue, il n’a goût à rien.
Quand on a pris un engagement, on va au bout
Enfin j’ai une réponse, le secrétaire du vétérinaire me propose un rendez-vous pour 14heures. Elle me conseille de veiller sur l’animal et les rappeler si la situation se dégradait. Elle est rigolote, mais moi je risque gros. Après les maths, c’est la physique et en début d’après-midi le cours d’anglais, je vais en entendre parler. Un appel au lycée pour leur expliquer mes contraintes ne les convainc pas du tout. Si je ne viens pas avec une excuse valable, c’est la colle assurée. Tant pis, il faut savoir gérer les priorités, Pompon passe en premier, il sera toujours temps de rattraper ce que j’ai manqué.
Garde malade, ce n’est pas une vocation mais je fais face
Enfin, il est là. Il ausculte le malade. Son métier n’est pas facile, il ne peut même pas l’interroger pour connaître les endroits où ça fait mal. Mais cela n’a pas l’air de lui poser de problème et il prescrit un remède de cheval, avec en prime un vermifuge. Il repart vers sa tournée en me laissant seul une fois de plus. L’après-midi file à toute vitesse, je fais des allers-retours du box à la maison pour surveiller l’évolution. Francis repasse me voir et me félicite pour mon implication. Je lui parle des maths, il me répond que demain les règles n’auront pas changé alors que Pompon lui n’aurait peut-être pas résisté.
Le poney est un animal attachant
En soirée tout le monde rentre et découvre ce qui s’est passé. Je me sens beaucoup plus rassuré de les avoir avec moi. Je leur raconte dans le détail ma journée. Tu as fait ce qu’il fallait et on verra demain l’évolution. Je n’ai aucun mal pour sortir de mon lit ce matin. Mes pas m’emmènent directement vers les boxes. Pompon est debout, il s’approche de moi comme pour me remercier. Les deux fois quatre heures en retenue pour avoir séché toute la journée ne sont même pas une punition. Je ne regrette rien et le soir, une jolie carotte vient récompenser le convalescent. Depuis, je participe beaucoup plus à la vie des écuries.
Ami lecteur, qu’aurais-tu fait à ma place entre la vie de Pompon et des examens importants ?
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Histoire écrite spécialement pour Aurélie du Blog adadamondadou.com
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